Ce mardi 10 décembre, dans le cadre de l’examen du projet de rapport d’évaluation des politiques publiques visant à favoriser l’accès à la culture des personnes en situation de handicap, j’ai interrogé en Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, Madame Sophie METTE et Monsieur Yannick MONNET, co-rapporteur·es.
J’ai notamment insisté sur les sujets de l’accès à la culture pour les personnes en établissement, sur les freins entourant le handicap à proprement parler, ainsi que sur la dimension sociale de l’expérience culturelle.
Découvrez mon intervention :
Verbatim de mon intervention :
Merci madame la vice-présidente, madame et monsieur les rapporteurs.
Merci pour la qualité de votre travail et moi j’ai beaucoup apprécié l’angle qui est rappelé dès l’introduction, c’est-à-dire que quand on parle d’accessibilité en matière de culture, il faut raisonner avec la diversité de la nature des différents handicaps et malheureusement trop souvent, pendant trop longtemps, quand on a parlé d’accessibilité aux lieux culturels on parle de lieux et d’accessibilité uniquement sous le prisme de l’accessibilité pour les handicaps physiques donc on va parler d’aménagement de lieux, or la culture ce n’est pas que des lieux et le handicap bien évidemment ce n’est pas que du handicap moteur ou physique et ça vous le vous le précisez bien dans votre introduction. Cela ouvre malheureusement une complexité de situation et énormément de zones grises puisque si l’accessibilité physique des lieux culturels a beaucoup progressée depuis 2005 même s’il reste beaucoup de travail, on entre vraiment là dans des zones grises voire noires.
J’aurai trois remarques, trois questions.
Premièrement sur ce que vous évoquez concernant les personnes qui sont aujourd’hui en établissement. Et vous dites effectivement que l’accessibilité aujourd’hui culturelle des personnes en situation de handicap dans les établissements est vraiment le « parent pauvre » des politiques culturelles. C’est vrai. Vous formulez diverses propositions et en particulier autour de la question du « pass culture ». Ça ne concerne qu’une partie bien évidemment des personnes en situation de handicap puisque dans les établissements, qu’il s’agisse de Foyers d’accueil médicalisés (FAM), de Maisons d’accueil spécialisées (MAS), etc. Il y a aussi des adultes donc quelle réponse est-on en capacité d’apporter pour ces personnes-là et y compris, non seulement, dans la capacité d’aller de sortir des établissements pour aller à la culture, mais y compris pour faire venir la culture dans ces établissements ? Et là, on se heurte à d’autres problématiques, y compris ce que vous évoquiez tout à l’heure, c’est-à-dire des professionnels qui nous disent qu’on ne sait pas faire, on n’est pas formé pour déployer notre expertise culturelle, notre compétence vis-à-vis de ce public-là.
Le deuxième sujet, vous l’avez évoqué, ce sont les freins connexes à la seule question du handicap pour accéder à un certain nombre de pratiques culturelles et notamment au spectacle vivant, où il y a des freins qui ne sont pas forcément évidents de prime abord, la question par exemple du niveau de bruit, la question de la capacité à se retrouver dans une foule ou en tout cas dans un groupe, la capacité à pouvoir venir avec un aidant, une personne qui accompagne. Là, quel est le rôle du législateur par rapport à ces freins-là ? Est-ce que l’on doit améliorer les choses par un renforcement ou un durcissement de la loi pour rendre des choses obligatoires ? Ou est-ce que l’on doit s’en remettre au bon vouloir ou parfois aussi à la mauvaise volonté d’un certain nombre d’acteurs locaux et aussi à leur capacité en termes de moyens ? Puisqu’effectivement, par exemple, décider de la gratuité de l’entrée à un spectacle pour un aidant, c’est aussi un choix, une politique tarifaire, etc. Donc faire pour que ça ne soit pas laissé uniquement au bon vouloir et aux capacités financières des personnes ?
Et le troisième sujet qui est peut-être un peu plus complexe et qui me semble, peut-être, être un angle mort ou en tout cas angle insuffisamment travaillé du rapport, c’est l’évaluation de la pratique sociale d’une activité culturelle, c’est-à-dire que pour beaucoup de personnes en situation de handicap et notamment les jeunes, par exemple, quand on va sur un lieu culturel, quand on va pratiquer une activité culturelle en groupe ou quand on y va avec sa famille, la dimension sociale de l’événement est, j’ai envie de dire, tout aussi importante que la pratique culturelle en elle-même. Or, si pour pouvoir accéder à cette pratique culturelle, il faut que la personne en situation de handicap soit à part, avec des outils spécifiques, voire dans des lieux séparés, eh bien on gâche véritablement l’expérience culturelle parce qu’on gâche l’expérience sociale. Et la notion d’inclusion est aussi, à mon sens en tout cas, intimement liée à la capacité de faire ensemble, d’être avec les autres, avec ses copains, avec sa famille, ce qui n’est pas toujours possible. Ce qui n’est pas non plus toujours facile à faire, bien évidemment. Qu’est-ce que vous pensez de cette situation-là ?
Je vous remercie.