Plutôt que de répondre aux vraies urgences de l’agriculture, le gouvernement réautorise un pesticide sans débat et sans expertise scientifique !

L’Assemblée nationale devait débattre à partir d’hier de la proposition de loi dite Duplomb, qui vise notamment à réautoriser les néonicotinoïdes, à revenir sur l’indépendance de l’Anses et à faciliter le déploiement des mégabassines. 

Ce texte constitue une nouvelle étape de l’offensive réactionnaire de la droite qui, face au vide et à l’impuissance de l’exécutif, fixe l’agenda idéologique de notre pays et fracture notre société. Avec mes collègues députés socialistes, nous étions et demeurons clairement opposés à ce texte, écrit sous la dictée d’un syndicat agricole.
Jusqu’à preuve du contraire, ce sont les députés qui font la loi : il est donc inadmissible d’entendre M. Rousseau, Président de la FNSEA, appeler à voter une motion de rejet comme il l’a fait hier.

Non, ce texte ne répond pas au malaise agricole, mais aux obsessions d’une partie du monde agricole (et surtout agro-alimentaire), et est donc très loin de faire consensus en son sein.
Notre agriculture est confrontée au double défi d’une falaise démographique et du mur climatique. Cette proposition de loi démagogique occulte les vrais sujets. Loin de répondre aux raisons profondes du malaise agricole, elle n’est que l’expression de revendications corporatistes.

Elle n’apporte aucune réponse pour protéger le revenu de nos agriculteurs, à travers la lutte contre la concurrence déloyale internationale mais aussi intra européenne, ainsi que la régulation des marges de la grande distribution et de l’agroalimentaire.
Elle n’apporte aucune réponse pour renouveler les générations, à travers une vraie régulation foncière ou pour soutenir l’élevage, pilier de notre souveraineté alimentaire.

Après les reculs annoncés du Pacte vert européen et la mort programmée de l’Agence bio, cette proposition de loi est à contre temps des urgences écologiques. Elle remet brutalement en cause l’indépendance de la science et la transition agroécologique, qui est le seul chemin pour concilier notre souveraineté alimentaire, le respect de la santé humaine et celle de l’environnement. 

Pour notre part, si nous avions des lignes rouges non discutables, nous étions prêts à faire notre travail de parlementaires, en responsabilité, pour améliorer le texte.
Or, à l’aveuglement économique et social, à l’inconséquence sanitaire et environnementale, vient désormais s’ajouter le déni démocratique et parlementaire.
En décidant de rejeter son propre texte par une manœuvre de procédure, le centre et la droite, avec le soutien de l’extrême droite, ont contourné le débat parlementaire. C’est une atteinte grave à notre démocratie. En rendant les arbitrages sur des sujets essentiels à huis clos, au sein de la commission mixte paritaire, on prive nos concitoyens de toute transparence.

Le groupe Socialistes et apparentés avait accepté que le débat puisse se tenir à l’Assemblée nationale avec la mise en place d’un temps législatif programmé, pour permettre à l’ensemble des groupes politiques de faire valoir leurs positions sur des sujets aussi graves. Cette solution de compromis a malheureusement été rejetée par le centre et la droite.
Ce passe-passe de procédure n’est pas glorieux. Il va peut-être permettre aux défenseurs du texte d’éviter d’assumer leur position devant l’ensemble de la Représentation nationale et donc des Français, et répondre à leur crainte de se voir mis en minorité sur l’article 2. Mais, en définitive, il ne fera qu’affaiblir et discréditer le Parlement.

 Le gouvernement est donc prêt à réintroduire un néonicotinoïde sans débat démocratique ni expertise scientifique, c’est une faute lourde !

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